La Belgique a remis lundi la dernière dépouille du dirigeant congolais assassiné Patrice Lumumba – une dent – à sa famille, tournant la page d’un sombre chapitre de son passé colonial.
Le procureur en chef Frederic Van Leeuw a donné aux proches une petite boîte bleu vif contenant la dent lors d’une cérémonie télévisée, et a déclaré que l’action en justice qu’ils avaient entreprise pour recevoir la relique avait rendu « justice ».
La dent a été placée dans un cercueil qui a ensuite été drapé du drapeau de la République démocratique du Congo, qui célèbre Lumumba, assassiné par des séparatistes et des mercenaires belges en 1961, en tant que héros anticolonial.
L’assassinat de Lumumba – et l’histoire brutale du contrôle belge du Congo – ont été des sources durables de douleur entre les deux pays.
Le Premier ministre belge Alexander De Croo a réitéré que les autorités de son pays portaient une « responsabilité morale » dans le meurtre.
« Je voudrais, en présence de sa famille, présenter à mon tour les excuses du gouvernement belge », a-t-il déclaré.
« Un homme a été assassiné pour ses convictions politiques, ses propos, ses idéaux. »
Le fils de Lumumba, François, a déclaré à la chaîne de télévision belge RTBF que ses proches attendaient « plus de 60 ans » pour cet événement.
« Je pense que cela apportera du réconfort à la famille et au peuple congolais », a-t-il déclaré.
« Nous ouvrons une nouvelle page de l’histoire. »
Critique ardent du régime rapace de la Belgique, Lumumba est devenu le premier Premier ministre de son pays après son indépendance en 1960.
Mais il s’est brouillé avec l’ancienne puissance coloniale et les États-Unis et a été évincé par un coup d’État quelques mois après son entrée en fonction.
Il est exécuté le 17 janvier 1961, à seulement 35 ans, dans la région sud du Katanga, avec le soutien de mercenaires belges.
Son corps a été dissous dans de l’acide et n’a jamais été retrouvé.
Mais la dent a été conservée comme trophée par l’un des intéressés, un policier belge.
La dent a été saisie par les autorités belges en 2016 à la fille du policier, Gérard Soete, après que la famille de Lumumba a porté plainte.
« Deuil national »
Le cercueil contenant la dent devrait être ramené en RDC où il sera officiellement inhumé sur un site commémoratif.
Le pays doit organiser trois jours de « deuil national » du 27 au 30 juin – son 62e anniversaire d’indépendance – pour marquer la cérémonie d’inhumation.
Le fils aîné de Lumumba, François, a déposé une plainte en Belgique en 2011, pointant du doigt la responsabilité du meurtre de son père contre une douzaine de fonctionnaires et diplomates belges.
L’enquête pour « crimes de guerre » est toujours en cours mais seuls deux des responsables visés sont encore en vie.
Une commission d’enquête parlementaire belge en 2001 a conclu que la Belgique avait une « responsabilité morale » dans l’assassinat et le gouvernement a présenté les « excuses » du pays un an plus tard.
De Croo a déclaré que les responsables belges « ont choisi de ne pas voir, ont choisi de ne pas agir » pour arrêter le meurtre, même s’ils n’avaient pas directement voulu que cela se produise.
Les enfants de Lumumba ont également été reçus lundi par le roi de Belgique Philippe, qui s’est rendu ce mois-ci en RD Congo pour exprimer ses « plus profonds regrets » sur le passé colonial.
Les historiens disent que des millions de personnes ont été tuées, mutilées ou sont mortes de maladie alors qu’elles étaient forcées de ramasser du caoutchouc sous la domination belge. La terre a également été pillée pour ses richesses minérales, son bois et son ivoire.